Monsieur Lagrave utilise aussi un argument que l'on
pourrait qualifier de « sentimentalement polémique » et qui, pris dans sa rigueur, interdirait toute critique à l'égard d'un ouvrage publié par un éditeur ami. « Nous sommes concernés, écrit-il, en tant qu'éditeurs de Monsieur Couvert. (...) Ou bien Paul Sernine a raison, et il nous faut le reconnaître et opérer une révision déchirante des positions que nous avons tenues jusqu'ici... »
La question ne se pose nullement en ces termes mélodramatiques. Nous avons de l'admiration et de la reconnaissance envers toute l'équipe de Chiré (parmi laquelle Monsieur
Lagrave) pour le travail accompli depuis 40 ans au service des bonnes idées. Chiré, avec un zèle persévérant, poursuit le combat pour l'Église et pour la France, contre la franc-maçonnerie et contre les forces occultes, et mène bien ce combat.
Les dizaines de livres publiés par Chiré, les centaines de numéros de ses revues, les milliers de livres diffusés chaque année, tout cela est excellent, même et surtout lorsque ces livres et revues dénoncent les graves erreurs qui menacent la chrétienté.
Allons plus loin : dans les Cahiers Barruel et dans les livres de Monsieur Couvert, ont été dénoncés des auteurs et des œuvres qui méritaient d'être dénoncés.
Nous n'avons donc aucunement l'intention de contester l'œuvre de Chiré. Notre propos est beaucoup plus modeste, et en rien mélodramatique : nous contestons simplement cinq livres publiés par Monsieur Couvert à Chiré (dont certains à compte d'auteur, semble-t-il), vingt-sept numéros d'une revue et quelques brochures. Encore ne les contestons-nous pas en tous points, mais dans leur angle d'attaque spécifique et inédit, à savoir le fait de réduire toutes les erreurs à une « gnose » indéfiniment plastique et malléable qui transcenderait le temps et l'espace, ce que Monsieur Couvert a fini lui-même par appeler « la gnose universelle ».
n n'y a donc aucune raison pour Monsieur
Lagrave, ni pour Chiré, de se sentir l'objet d'attaques. Encore moins y a-t-il nécessité d'une « révision déchirante ». D'abord parce que nous n'imposons pas nos arguments : nous les proposons à la raison et au public. Si Monsieur Lagrave n'entend pas être convaincu par eux, libre à lui ! Ensuite parce que la seule révision qu'il aurait à faire, s'il acceptait nos arguments, serait d'abandonner cette idée d'une « gnose » transhistorique. Mais il n'aurait nullement à abandonner (bien au contraire) son opposition motivée à Guenon, à la franc-maçonnerie, au marxisme ou à Descartes, pour reprendre quelques-uns des mouvements ou personnes que Monsieur Couvert regroupe dans sa notion de « gnose ».
Nous demandons donc à Monsieur Lagrave la permission d'exposer sereinement les arguments qui nous paraissent démontrer que, sur le point central de sa thèse, Monsieur Couvert est dans l'erreur. Pas plus, mais pas moins.