Le débat d'idées que
nous proposons porte sur ce point précis : cette notion moderne de
« gnose », clé d'explication de toutes les erreurs proposée par les Cahiers
Barruel, est-elle une réalité ou une chimère ? Pour notre
part, nous entendons démontrer, preuves à l'appui, qu'il s'agit d'un
mythe, historiquement faux et intellectuellement absurde.
Entendons-nous bien :
beaucoup des auteurs dénoncés par les Cahiers Barruel (même si
ce n'est pas le cas de tous, et pas sous le même rapport, et pas tous
à égalité) enseignent des erreurs graves et des hérésies. Mais ce
qui distingue l'école des Cahiers Barruel de tous ceux qui, bien
avant eux et encore aujourd'hui, dénoncent ces erreurs, c'est que les Cahiers
Barruel prétendent regrouper toutes les erreurs en cette « gnose
» indéfiniment plastique et malléable, qui les causerait, les
rassemblerait et les expliquerait.
Monsieur Couvert a donné
plusieurs formulations de cette doctrine de la « gnose universelle ».
« Ceux qui ont suivi nos
études précédentes, nous dit-il, ont bien compris que nous nous efforçons
de poursuivre à travers les siècles une gnose qui se cache derrière
des mouvements de pensée en apparence spontanés » (La gnose
universelle, p. 91). « Toutes ces hérésies énumérées se ramènent
à la gnose, comme nous l'avons déjà expliqué » (La gnose
universelle, p. 95).
« II est bien dommage,
affirme-t-il encore, que Monsieur Besançon ait mis en doute l'existence
d'une tradition gnostique à travers les siècles. Toutes nos études précédentes
ont établi avec un luxe de preuves décisives l'existence de cette
tradition » (La gnose universelle, p. 170).
« Tous les lecteurs
simplement honnêtes de mes livres sur la gnose, écrit-il aussi, ont
bien compris mon propos : donner une vue d'ensemble des assauts de
la révolution antichrétienne au cours de l'histoire. Montrer que ces
assauts successifs ont pour principe quelques erreurs clefs, toujours
les mêmes, présentées sous des déguisements divers, mais que le
point de départ est la gnose des premiers siècles. Exposer les grands
thèmes de cette pensée gnostique à travers les œuvres littéraires
de tous les temps et leur pénétration dans la société chrétienne »
(La gnose en question, p. 143).
C'est cependant dans son
deuxième livre que Monsieur Couvert a proposé la formule la plus
ramassée et la plus expressive, à laquelle nous nous référerons donc
constamment : en toute erreur, « il y a une clé... et c'est la
"gnose" » (La gnose contre la foi, p. 161).
Tel est l'apport spécifique
de l'école des Cahiers Barruel, tel est l'objet du présent débat
d'idées.