Sentant combien son argumentation est faible, le Sel de la
terre tente le tout pour le tout en faisant comparaître le démon.
Cependant, même si ce dernier est bon diable, il n'est que d'un faible secours
en une telle circonstance.
« On pourrait dire, écrit ainsi le Sel de la terre, que
le mot "démon" est peu employé dans les textes du Magistère, et
peut-être trouverait-on difficilement un texte des papes ou des conciles qui
condamne le démon en tant que tel. »
Le raisonnement implicite du Sel de la terre est donc
le suivant : « Le mot "démon" n'est pas employé par les
papes ; pourtant, le démon est certainement condamné par les papes ;
donc, le fait que les papes n'emploient pas le mot "gnose" ne les
empêche pas d'avoir condamné la "gnose". »
La première faiblesse de l'argument du Sel de la terre est
de reposer sur une erreur flagrante (qui tend à prouver que son rédacteur
fréquente peu les écrits des papes) : contrairement aux affirmations du Sel
de la terre, les papes parlent régulièrement du démon.
Pour le manifester, et sans recherches extraordinaires, nous
donnerons simplement une citation de chacun des principaux papes catholiques du
XIXe et du XXe siècles.
« A cette époque de profondes misères et de violentes
tempêtes, Satan n'a pas moins cherché qu'à toute autre époque antérieure à
nous passer tous au crible comme le froment » (Pie VII, encyclique Diu satis
du 15 mai 1800).
« C'est donc sur cette pierre qu'est fondée l'Église.
Cette Église s'élève majestueuse et, dans sa majesté, elle dépasse les
nuées et touche au ciel. (...) Voilà les paroles qui ont exaspéré les
fureurs de l'enfer et qui ont suscité les desseins perfides et ingrats des fils
de Satan qui parcourent les chemins de la terre et ne veulent plus entendre
parler de ce pouvoir souverain donné par Dieu à son Vicaire » (Pie IX,
allocution du 7 mars 1873).
« Depuis que, par la jalousie du démon, le genre humain
s'est misérablement séparé de Dieu, auquel il était redevable de son appel
à l'existence et des dons surnaturels, il s'est partagé en deux camps ennemis.
(...) Le premier est le royaume de Dieu sur la terre. (...) Le second est le
royaume de Satan » (Léon XIII, encyclique Humanum genus du 20 avril
1884).
« A la mission qui Nous a été confiée d'en haut de
paître le troupeau du Seigneur, Jésus-Christ a assigné comme premier devoir
de garder avec un soin jaloux le dépôt traditionnel de la foi, à rencontre
des profanes nouveautés de langage comme des contradictions de la fausse
science. Nul âge, sans doute, où une telle vigilance ne fût nécessaire au
genre humain : car il n'a jamais manqué, suscités par l'Ennemi du genre
humain, d'hommes au langage pervers, diseurs de nouveautés et séducteurs,
sujets de l'erreur et entraînant à l'erreur » (saint Pie X, encyclique Pascendi
du 8 septembre 1907).
« Lorsqu'il descendit du Ciel pour rétablir parmi les
hommes le règne de cette paix, détruite par la jalousie de Satan, Notre
Seigneur Jésus-Christ ne voulut pas d'autre fondement pour cette restauration
que celui de la charité » (Benoît XV, encyclique Ad beatissimi du 1er
novembre 1914).
« La lutte entre le bien et le mal, triste héritage de la
faute originelle, continua de sévir ; l'ancien Tentateur n'a jamais
cessé, par ses promesses fallacieuses, de tromper le genre humain. C'est
pourquoi, au cours des siècles, on a vu les bouleversements se succéder
jusqu'à la révolution actuelle » (Pie XI, encyclique Divini Redemptoris du
19 mars 1937).
« Dans leur souveraine impudence, ceux qui haïssent le nom
de Dieu tirent profit des secours et des moyens de tout genre. Livres,
mémoires, journaux, émissions radiophoniques, meetings, réunions publiques et
conversations privées, sciences et arts, tout leur sert pour répandre le
mépris des choses saintes. (...) Nous estimons que de tels faits ne se
produisent pas sans l'intervention perfide de l'Ennemi infernal dont c'est le
propre de haïr Dieu et de nuire aux hommes » (Pie XII, Exhortation apostolique
à l'épiscopat du 11 février 1949).