Les textes de ces neuf « auteurs approuvés » sont donc
censés montrer que la notion spécifique de « gnose » proposée par les Cahiers
Barruel et Monsieur Couvert possède de fortes racines dans la tradition
catholique.
Redisons une fois encore ce qu'est cette notion de « gnose
», avant de vérifier si les textes cités la soutiennent et la promeuvent. Il
s'agirait d'une notion englobante qui recouvrirait toutes les erreurs parues
dans l'histoire de l'humanité, ou à paraître. En toute erreur, nous dit en
effet Monsieur Couvert, « il y a une clé... et c'est la "gnose" » (La
gnose contre la foi, p. 161).
Or, une lecture même superficielle des 48 pages du dossier
fait apparaître de nombreuses affirmations en contradiction avec la « gnose »
barruellienne.
Pour le premier auteur cité par le dossier, à savoir
Bossuet, le manichéisme a disparu pendant de très longs laps de temps :
« En 1017, sous le roi Robert, on découvrit à Orléans des hérétiques d'une
doctrine que l'on ne connaissait plus il y avait longtemps parmi les Latins »
(p. 11). Et encore : « Lorsque, par l'éminente doctrine de saint Augustin
et de saint Gélase, [cette erreur manichéenne] fut éteinte dans tout
l'Occident, et dans Rome même où elle avait tâché de s'établir, on voit
enfin arriver le terme fatal du déchaînement de Satan. (...) A peine put-on
éteindre ce feu durant trois ou quatre cents ans, et on en voyait encore les
restes au quinzième siècle » (p. 22). Par ailleurs, Bossuet affirme
catégoriquement que la doctrine des Vaudois, loin d'être un avatar de la «
gnose » au même titre que celle des Manichéens, n'a rien à voir avec le
système manichéen : « La première [secte] dont il nous parle est celle
des pauvres de Lyon, descendus de Pierre Valdo ; et il en rapporte tous les
dogmes. Tout y est très éloigné des manichéens » (p. 18).